Mantis 18 (Spring 2020)
Heather Dohollau
Un reve
pour Marina Tsvetaeva
« Ma mère est dans le jardin »
« Puis-je la voir ? »
Une forme en noir au loin
Court sur la pente
Devant les tables
A la terrasse d’un café
Une gitane danse
Ses enfants font la quête
Mais elle est morte
Et seule la craie du cœur
Indique sa présence
Sur la porte d’un rêve
Et sur les vitres froides
Poussent les fleurs
Indomptées
De son souffle
Aime ce que tu aimes
Loi qui révèle le seuil
De la maison des jours
Qui ouvre les fenêtres
Sur le feuillage réel
Les arbres d’une terre sauve
Loi sans contrainte
Avancée dans une eau très claire
Où la chaleur mêle les frontières de soie
Et au cœur lisse des vagues
Sommeille l’écume
Il y a des rues qui se dédoublent comme les êtres
Non-carrossables pour la mémoire
Elles nous hantent comme celles que nous n’avions pas prises
Aux carrefours abruptes de la vie incertaine
Et cependant elles sont là. Des traits de blancheur
Entre la maison spectrale et le jardin exemplaire
Comme sont droits les désirs qui mènent
Où le bleu commence
L’automne sait-il qu’il n’est pas le printemps
Dans la merveilleuse lenteur des choses avant la chute
Quand l’herbe est très verte et la lumière poudrée d’or
Et les champs inondés piègent les oiseaux du ciel
Vivre entre les bords du temps comme dans une coupe
Où la feuille sèche et courbée comme une voile
Est le fragile bateau d’une fleur de mai
Qui sait en quelle direction souffle le vent
Habiter la lenteur
Se bercer en elle
Là où entre les collines
Les brumes du matin
Séparent les sommets
D’une blancheur de souffle
A ce moment
Une porte s’ouvre
L’arbre n’est plus
Contre le ciel
Mais dedans
A Dream
for Marina Tsvetaeva
‘My mother is in the garden.’
‘May I see her?’
A far-off dark form
runs on the slope
facing the tables
on the café terrace
a gypsy dances
and her children beg
but she is dead
and only the heart’s chalk
preserves her presence
on the door of a dream
and on chilly windows
grow the untamed
flowers of
her breath
Love what you love
law that lays bare the threshold
of the house of days
that opens the windows
on the real foliage
trees of a sanctuary land
unconstrained law
advanced by a very clear water
where heat mixes the frontiers of silk
and in the waves’ lissom heart
snoozes the foam
There are streets that duplicate like beings
impassable to memory
haunting us like roads not taken
at the sudden crossroads of uncertain life
and yet there they are. White features
between the ghostly house and the exemplary garden
how straight are desires that lead
to where the blue begins
Does autumn know it’s not spring
in the fabled slowness of things before the fall
when the grass is lush-green and the light powdered gold
and the drowned fields trap the birds of the air
To live between the rims of time as in a goblet
where dry and curved the leaf like a sail
is the fragile boat of a mayflower
that knows which way the wind blows
To live in slowness
rock oneself in it
where morning mists
between the hills
separate the slopes
with the whiteness of a breath
At that moment
a door opens
the tree is no more
against the sky
but within it